Que tous soient un
Jn 17, 20-26
Dans ce discours avant la passion, le Christ nous parle de la mission des disciples dans le monde avec la grande interrogation de l’unité entre les chrétiens. S’ils sont unis, ils peuvent participer à la glorification de Dieu, celle du Père et celle de Jésus. Tous ces textes tournent autour de cette injonction : que tous soient un. Une réalité spirituelle à construire. Voilà la mission.
On utilise ce texte dans les rencontres oecuméniques. Le caractère d’invitation, d’appel de ces phrases montre que cette unité, capitale pour la mission, est toujours à parfaire.
A partir de là, il faut faire une réflexion sur l’unité et la division dans la foi. Il faut s’interroger sur les lieux et les sources de la division. On pourrait parler des divisions avec les orthodoxes depuis le XI° siècle ou celles qui existent avec les protestants depuis le XVI° siècle.
Je préfère parler des divisions qui existent aujourd’hui. C’est plus sensible, mais plus proche de nous. Je ne m’intéresse pas ici aux différences superficielles de la forme ou de la couleur des costumes des uns ou des autres.
Je pars de l’exhortation du pape François, Traditionis custodes parue en juillet 2021 sur le rite extraordinaire en latin. Benoit XVI avait fixé un modus vivendi assez souple en 2007, avec une ouverture aux messes en latin un peu partout. François est plus restrictif.
C’est que l’expérience et les remontées des évêques ont montré au pape François que derrière la liturgie, il existe en fait des communautés de refus du concile Vatican II qui se constitue. Le latin et le rite liturgique traditionnel cachent des divisions profondes des traditionalistes avec l’Eglise. Pour le pape, l’unité de l’Eglise était en jeu, pas sur la liturgie mais sur le fond, sur la théologie.
Cela vient de loin. Mgr Lefebvre exprimait sa différence par le latin mais la différence était théologique et profonde, notamment sur le statut de la vérité, sur la liberté religieuse, sur le dialogue entre les religions etc. La liturgie n’était qu’une façade.
Le pape François a donc mis de nouvelles conditions beaucoup plus restrictives pour la messe en latin. Les groupes traditionalistes sont très mécontents. Mais l’enjeu est bien celui de l’unité théologique de l’Eglise. On ne peut pas jouer à cache-cache avec Vatican II. Ce concile, universel par nature, a été le fruit de discussions longues pour obtenir l’unité. Tous les textes étaient votés à 95 ou 98 % des présents pour éviter justement les divisions.
Le texte du concile sur la liturgie a été le premier voté et le plus facilement. Cela montre bien que la division actuelle sur la liturgie est une division de façade qui cache des dérives théologiques, des radicalisations, qui suivent celles qu’on observe dans la société. C’est la relation au monde qui est en jeu, avec une recherche pour certains d’un rôle immédiat de la loi chrétienne dans le monde.
L’unité de l’Eglise est fortement abimée. Elle ne sera pas rétablie par des paroles magiques mais par des efforts de tous pour revenir à l’Evangile, à son esprit, aux paroles du Christ sur l’accueil et l’ouverture du salut à tous.
Pierre de Charentenay sj.