Homélie de la nuit de Noël

Aujourd’hui, dans la ville de David, vous est né un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur.. ? Le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous ». Comment entendre ce soir la Parole de Dieu dans la poursuite de notre veillée de Noël ?
Contemplons la Sainte Famille posée sur le globe symbolisant une crèche. Le tout est porté par une main d’adulte qui le tend à une autre main, plus jeune. Arrêtons notre regard sur cette scène qui nous parle de la naissance de Jésus, nom qui veut dire « Dieu sauve » ; cette scène qui nous parle aussi de notre préoccupation de protéger notre « maison commune »
………. Que pouvons-nous voir ? Qu’est-ce que cette scène nous inspire ?
Trois choses pour ma part qui nous rappellent les mots du pape François : « Tout est lié ».

1) « Dieu choisit les petits pour changer le monde », telle est une citation de la plateforme Laudato Si’.
Cette phrase trouve vraiment tout son sens en contemplant l’enfant Jésus dans la crèche, pauvre, humble, couché tout simplement dans une mangeoire. Et pourtant, c’est bien la promesse de la venue du Sauveur, reçue depuis l’ancienne alliance qui se réalise à travers « ce petit bout de chou » ! C’est lui qui va renouveler non seulement la face de la terre comme nous le rappelle le psaume 103 mais aussi nos coeurs vers plus d’humilité et de simplicité.
Oui, la conversion écologique s’obtiendra dans la durée si seulement, en amont, une conversion personnelle et collective est promue, encouragée et vécue. Elle débouchera alors sur des actions concrètes, petites ou grandes pour protéger notre « maison commune » – la terre et la passer aux générations futures.
Aussi, face aux appels incessants des publicités et aux éventuelles tentations du monde de consommation à outrance, comment développer davantage des attitudes personnelles et collectives ajustées pour promouvoir une sobriété heureuse qui ne nous empêchera pas de vivre de belles célébrations et fêtes familiales et amicales ?
Qu’est-ce que les petits et les pauvres de ce monde ont à nous dire dans notre désir de voir le monde changé et transfiguré ? Des changements s’opèreront grâce aux petits et grands pas que nous faisons et ferons sans oublier les changements structurels de nos sociétés voulus et déterminés, après concertation, par des décisions politiques.

2) Cette main d’adulte ou d’aîné pourrait symboliser la personne qui a fait l’expérience d’une relation si fructueuse et forte avec le Seigneur dans la foi qu’elle ne peut la garder pour elle-même. Elle est désireuse de la transmettre et de la partager avec une autre personne. Bien souvent, nous entendons dire : « pourquoi faire baptiser mon enfant encore bébé ? ».
Quoi répondre dans ce cas ? Ne serait-ce pas dans la même logique que des parents chrétiens souhaitent faire baptiser leur enfant dès leur plus jeune âge, non pas pour leur imposer la foi chrétienne ou pour faire plaisir aux grands-parents, et que sais-je ! Mais, c’est plutôt parce qu’ils ont vécu une telle expérience forte de l’amour de Jésus, l’ami, le frère, le bon pasteur ou le Sauveur qu’ils ne veulent pas garder ce trésor pour eux ? Ils veulent le faire partager à leurs enfants, comme une semence, même si ces derniers prendront du temps ou pas du tout pour adhérer pleinement à la foi et l’entretenir avec l’aide des proches.
Nous pouvons aussi voir dans cette scène la Sainte Famille qui est réunie. Elle nous rappelle comment Marie et Joseph vont prendre soin de Jésus, leur enfant. Et là, nous pouvons aussi voir que Jésus nous est confié à travers cette main qui soutient la crèche. En prenant soin de notre foi, la manière dont nous l’entretenons, seuls et avec les autres, nous prenons aussi soin de Jésus, l’Emmanuel, Dieu-avec-nous au coeur de sa création.
Notre foi se veut bien incarnée, notre foi se veut amour, amitié, service et paix, comme
nous le rappelle Sainte Mère Teresa.

3) Si Dieu, en cette nuit de Noël, nous rappelle à travers la commémoration de la naissance de son Fils qu’il nous permet de prendre soin de Lui, qu’Il nous laisse le porter quand nous poursuivons l’oeuvre de sa création, nous pouvons aussi dire qu’il nous porte volontiers.
Vous connaissez certainement la belle histoire d’Ademar de Borros, celle des deux pas restant sur le sable. Cette histoire qui nous rappelle comment Dieu nous a portés quand nous étions perdus ou pris par tant de soucis. Et nous qui nous croyons que nous étions abandonnés par lui et que c’était nos pas qui étaient restés sur le sable… Non, Dieu ne nous abandonne pas.
Pour finir, je vous laisse avec une belle image que j’ai apprise quand je vivais dans l’ouest du Cameroun au pays du peuple Bamileke. Dans la langue Bandjoun, le mot « merci » n’existe pas. A la place ou pour dire l’équivalent du mot « merci », ils disent, « Motòkwa » qui veut dire : « Si personne ne te porte, que Dieu te porte » !
Pensons à tous ceux et toutes celles qui nous ont « portés », soutenus ou accompagnés cette année dans nos moments de joie comme dans nos moments de souffrance et de difficultés, surtout en ces temps de crise sanitaire et de situation socio-économique difficile.
Prions pour eux et rendons-grâce dans la joie de Noël !
Je vous dis tout simplement : « Motòkwa ».
Joyeux Noël à vous tous et à vos familles! Amen.

Steves Babooram, sj
St-Ferréol, le 24 décembre 2021

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