Homélie: 17 janvier 2021

« Jésus appelle »

Jésus appelle des personnes. Il ne les rallie pas à des idées. C’est dans ce sens que, récemment, le Pape François a rappelé que le christianisme n’est pas une idéologie. Dans la foi chrétienne, on ne suit pas des idées, mais une personne, le Christ ; on aime des gens, nos frères, nos sœurs. C’est pourquoi ces passages nous éclairent beaucoup sur notre foi.

Si Jésus avait voulu être efficace à notre manière, il aurait procédé autrement. Il aurait maitrisé sa communication ; il aurait su se servir d’outils performants ; il aurait fait de grands discours pour séduire et attirer l’attention sur lui. Au contraire, quand quelqu’un vient à lui, il l’écoute, s’intéresse, lui ouvre un chemin.

« Que cherchez-vous ? » Voilà une question bien embarrassante qui renvoient ses interlocuteurs, et nous-mêmes, à ce à quoi nous aspirons. Le Christ désire avoir en face de lui des personnes qui s’engagent, comme toujours dans la Bible, des gens désireux de tenir une alliance.

Curieuse réponse des disciples : « Où demeures-tu ? » Les disciples sentent qu’il y a quelque chose de différent avec Jésus. Ils auraient pu lui répondre : « on cherche la paix, le bonheur, la justice ». En demandant où Jésus demeure, ils ne lui demandent pas sa carte de visite, ni son adresse internet. Mais plutôt ce qui demeure en lui, ce qui le fait demeurer dans la paix, la vérité. Le patriarche du Liban disait un jour que son pays ce n’est pas là où il habite, mais ce qui l’habite. Les disciples ont vite compris qu’avec Jésus on n’est pas dans le débat d’idées.

La réponse suivante de Jésus prend alors tout son sens. « Venez et vous verrez ». C’est une démarche de foi. Oui, les disciples vont bien voir que Jésus n’a pas de maison, ni même une pierre où reposer sa tête ; que Jésus les emmène bien plus loin qu’un bout de terre, vers le monde entier. Il les conduit dans une nouvelle relation avec Dieu et avec les hommes.

C’est bien ce qu’avait compris Saint Paul. Le Christ demeure en nous, en notre corps (avec lequel on ne peut pas faire n’importe quoi, ni n’importe quelle éthique). Il demeure aussi dans notre cœur. Nos corps et nos cœurs sont invités à l’eucharistie.

La dignité de l’homme est d’être appelable et appelé par le Seigneur : « Parle, ton serviteur écoute ». C’est ainsi que des témoins nous ont transmis l’évangile et nous ont donné le goût d’y croire. Avec Jésus, il fallait le croire sur Parole. D’autres l’ont fait avant nous pour que nous soyons là aujourd’hui. A nous de parler maintenant à d’autres pour qu’ils trouvent la joie de croire et la joie de vivre.

Michel Joseph, sj

Homélie: 1er janvier 2021

Ajoutons de la vie à nos années. Lc 2,16-21

« Il est urgent de prendre un autre rythme en cette année pour retrouver notre humanité et en même temps défendre notre planète. Il est urgent de retrouver un peu de sagesse en prenant de la distance face à la productivité et à l’agitation ». Voilà ce que je disais l’année dernière lors de mon homélie du 1er janvier 2020 ici même. Et bien, cela s’est réalisé parfaitement, mais pas dans les circonstances qu’on aurait voulues. Nous avons pris de la distance par rapport à la productivité et l’agitation, mais ce fut contraint et forcé. Nous sommes passés d’un confinement à un autre, et de multiples mesures qui ont ralenti nos activités, nous contraignant parfois à rester chez nous. Contraint de ralentir, et parfois de tout arrêter, beaucoup de gens ont souffert, les personnes âgées en particulier. Nous avons donc pris un autre rythme, mais ce n’était pas notre choix. C’était la réponse à l’invasion de ce petit virus dans les rangs de notre humanité. L’Évangile de ce jour nous invite à reprendre le même chemin mais de manière libre, pour changer de rythme et peut-être changer de vie. « Marie retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur ». Après la naissance de Jésus, elle ne commence pas par faire des programmes, des plans pour les mois ou les années qui viennent. Elle laisse aux bergers le soin de chanter leur joie et de glorifier Dieu. Elle médite tous ces événements dans son cœur, comme s’il y avait là une promesse, quelque chose d’immense qu’elle a besoin de méditer longtemps pour lui laisser le temps de s’accomplir.

Ainsi en ce 1er janvier, nous méditons cette promesse qui nous est offerte pour une nouvelle année. C’est une année déjà chargée de nuages, de nuages noirs qui ne vont pas s’en aller en quelques mois. Il nous faudra encore de la patience et pas mal de courage. Beaucoup d’attention aussi à ceux qui nous entourent, à ceux avec qui nous travaillons, avec qui nous vivons. Mais cette promesse d’une nouvelle vie est là. Nous ne pourrons la vivre qu’en faisant comme Marie, donner une dimension intérieure à notre existence. Une nouvelle année ne vient pas seulement rajouter une unité de plus au nombre d’années déjà vécues. Elle nous offre une nouvelle opportunité pour repartir d’un nouveau pied.

Oscar Wild, qui n’est pas un auteur que l’on cite souvent dans les églises, le disait à sa manière : « Il ne faut pas chercher à rajouter des années à sa vie, mais plutôt essayer de rajouter de la vie à ses années ». Rajouter de la vie à ses années. Rajouter de l’intériorité et de la vérité à cette année qui vient. Ne pas nous laisser écraser par les circonstances.

Certes, cette pandémie vient troubler notre vie, notre routine, nos habitudes parfois toute l’organisati on de nos existences . , Mais la vie chrétienne n’a jamais et de tranquillité. été une promesse de stabilité et de sécurité, comme si elle était une assurance de paix Elle est un aiguillon de mouvement et de création avec cette injonction d’aimer son prochain comme soimême , toujours davantage comme dirait St Ignace Dans les nouvelles circonstances que nous viv r ons cette année , . sachons vigilant s à être nous préparer à vivre autrement, en nous adaptant avec courage et détermination aux nouvelles conditions qui limitent nos espaces de vie et de rencontre. Ne nous laissons pas aller au simple divertissement pour fuir la difficulté d’une vi e réduite, limitée dans ses possibilités. Préparonsnous à vivre autrement, par la méditation, la prière et la réflexion. Comme Marie, « tous ces événements, et méditons les dans notre cœur Bonne année 2021 ».

Pierre de Charentenay, sj

Homélie: 27 décembre 2020

On peut se demander à la suite de ces récits ce qu’on peut attendre de vieillards, tels Abraham, Sarah, couple âgé ne pouvant plus avoir d’enfants, de ce vieux Siméon, et de cette femme de 84 ans recluse depuis si longtemps ? Qu’est-ce qu’un enfant et de jeunes parents peuvent en attendre ?

Hélas, c’est bien dans cet état d’esprit que le monde actuel juge la situation de nos contemporains âgés ! Alors, qu’en est-il des relations de transmission, par exemple de la foi, entre les plus anciens et les plus jeunes ? entre les parents et les enfants ? Qu’est-il possible de vivre de tel dans ce monde quand on croit que pour transmettre il suffirait d’informer, si possible le plus vite possible ? La transmission se voit remplacée par la réponse et la réussite rapides. (cf Google ?). Mais la transmission peut-elle être remplacée par la solitude devant l’ordinateur ?

« La vérité ne s’enseigne pas, elle se vit », dit la philosophe Catherine Chalier ; elle continue : « C’est la forme singulière et vivante qu’elle prend chez des proches, parents, professeurs, amis, qui parfois donne à celui à qui on la transmet le désir de s’en approcher davantage, voire d’en vivre à son tour et ainsi d’en devenir le contemporain ». Ainsi comprises, les vies de Siméon, d’Anne, et de nos frères et sœurs âgés d’aujourd’hui, vies souvent discrètes qui passent inaperçues, prennent tout leur sens.

L’enfant a besoin d’entendre une parole bonne. « Nul enfant ne se lève et ne marche, ne sourit et ne parle, ne s’avance vers autrui avec confiance s’il n’est appelé à le faire ». Le mot ‘promesse’ est utilisé dans chacun de ces passages bibliques comme un acte fondateur. Dieu est fidèle. Dieu promet la vie, quelles qu’en soient les formes et les passages difficiles à traverser par soi-même, et qu’on ne peut vivre que seul d’ailleurs.

Voilà donc la longue tradition, la transmission de ceux qui, plus anciens, plus jeunes, peu importe, mettent une parole d’espoir dans l’inespoir et disent des paroles d’encouragement. Quelles que soient notre âge, nos capacités, nos responsabilités de parents, de frères, d’amis, nous sommes appelés par Dieu à être comme ces vieillards prêts à ces missions d’espérance. Dans ce contexte biblique, il n’est pas étonnant que Jésus grandissait, se fortifiait, rempli de sagesse.

Rendons grâce à Dieu d’avoir nous-mêmes rencontré et connu des femmes, des hommes, qui nous ont fait parvenir la force de l’évangile. A notre tour, « de faire découvrir cette promesse de vie divine au cœur de chacun ; c’est une mission d’espérance qui nous est confiée » (GC35).

Michel Joseph, sj
27 décembre 2020

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