Homélie: 14 février 2021

Loin du séparatisme, Jésus réintègre le lépreux

Cet Evangile de Marc nous raconte de nouveau un récit de guérison. Mais pas n’importe laquelle, Jésus guérit un lépreux, celui qu’on montre du doigt pour s’en écarter.

Or la lèpre, à cette époque, était considérée comme une impureté qui excluait le malade, non seulement de la vie sociale, mais de la société religieuse. Le lépreux était censé se trouver sous le coup d’un châtiment divin et mis au ban de la société. Bien sûr il y avait les risques de contagion. Et nous sommes bien au courant des problèmes de contagion avec le virus d’aujourd’hui qu’il soit britannique, sud-africain ou brésilien.

Mais le sens de cet Evangile n’est pas sanitaire, il touche la communauté. Il touche quelqu’un qui est mis au ban de la communauté et que Jésus va réintégrer.

En réfléchissant sur cet Evangile, je ne peux pas m’empêcher de penser à ce qui se passe ces jours-ci à l’Assemblée nationale où l’on discute de la fameuse « loi sur le séparatisme ». Je ne veux pas soulever ici des polémiques politiques, mais proposer rapidement une réflexion morale, ce que nous devons tous faire devant un projet qui n’est pas complètement mauvais mais qui peut poser certains problèmes. C’est un projet considérable, 51 articles sur 469 pages. On le trouve sur Internet bien évidemment.

Il vise essentiellement l’islamisme, encore faudrait-il préciser l’islamisme politique. Mais en faisant une loi de ce type, le texte atteint toutes les religions parce que faisant des projets pour les musulmans, il parle en fait de toutes les religions et vient changer l’esprit de la Loi de 1905. L’esprit de la Loi de 1905, c’est une séparation entre les religions et l’État, une séparation qui a été salutaire pour tout le monde. Les religions n’ont pas à imposer leurs valeurs à l’Etat, et l’État n’a pas à se mêler des valeurs des croyants.

Or dans ce texte précisément on invite les associations qui reçoivent des subventions, comme les scouts, les mouvements de jeunesse, les associations sociales ou caritatives, à signer un « contrat d’engagement républicain », c’est-à-dire à intégrer des valeurs de la République dans leur fonctionnement. Depuis quand l’État peut-il imposer des valeurs à des associations ? Ce contrat est d’autant plus déplacé qu’il y a déjà une multitude de législations qui protègent contre la discrimination, contre la violence, contre la polygamie, etc.

Le deuxième problème de ce projet est que tous les cultes vont être surveillés de beaucoup plus près. Les associations diocésaines de l’Eglise catholique devront obligatoirement demander des autorisations tous les cinq ans au préfet, ce qui peut créer des occasions de contrôle qui viennent limiter la liberté d’exercice des religions. Et pourtant, tous les garde-fous existent déjà pour que les lieux de culte, qu’ils soient catholique, juif ou musulman, ne débordent pas de leur propre fonction. Ainsi ce projet de loi a une manière de jeter le soupçon sur les pratiquants, et surtout sur ceux qui sont très pratiquants.

Les évêques français sont bien au courant de tout cela et discutent de ce sujet avec les députés, mais je voulais simplement attirer votre attention sur l’importance de ce genre de loi et sur la vigilance qu’il faut garder. Nos sociétés n’ont pas besoin de divisions supplémentaires, ni de chasse aux sorcières. Elles n’ont pas besoin que l’on montre du doigt des individus particuliers ou des groupes d’individus. De multiples lois existent, elles doivent être appliquées avant de se lancer dans des projets qui peuvent être très ambigus.

Pour revenir au texte de notre Évangile, Jésus ne reste pas à distance du lépreux. Il ne le laisse pas dans une catégorie séparée. Il va enfreindre la loi en le touchant malgré cette impureté fondamentale. Il va le guérir et l’envoyer aux prêtres pour qu’il soit réintégré. Car il fallait que la guérison soit homologuée par un prêtre, et à ce moment-là, il pouvait être réintégré.

En enfreignant la loi lui-même, Jésus réintègre le lépreux dans la communauté, au lieu de s’en séparer. Car c’est le plus important. Certes il est guéri de sa lèpre, mais surtout, la communauté est capable de l’intégrer sans peur ni soupçon. Une belle leçon pour aujourd’hui.

Pierre de Charentenay
14 février 2021

Message du pape François: carême 2021

Le message du Saint-Père pour le carême 2021 publié le vendredi 12 février 2021 : « Voici que nous montons à Jérusalem… (Mt 20,18)« .

Le Carême, un temps pour renouveler notre foi, notre espérance et notre charité.

Chers Frères et Sœurs,

En annonçant à ses disciples sa Passion, sa mort et sa résurrection, accomplissant ainsi la volonté de son Père, Jésus leur révèle le sens ultime de sa mission et il les appelle à s’y associer, en vue du salut du monde.

En parcourant le chemin du Carême, qui nous conduit vers les célébrations pascales, nous faisons mémoire de Celui qui nous a aimés « devenant obéissant jusqu’à la mort et la mort de la croix » (Ph 2,8). Dans ce temps de conversion, nous renouvelons notre foi, nous puisons « l’eau vive » de l’espérance et nous recevons le cœur ouvert l’amour de Dieu qui fait de nous des frères et des sœurs dans le Christ. Dans la Nuit de Pâques, nous renouvellerons les promesses de notre baptême pour renaître en hommes et femmes nouveaux par l’intervention du Saint Esprit. L’itinéraire du  carême comme l’itinéraire chrétien, est déjà entièrement placé sous la lumière de la résurrection, qui inspire les sentiments, les attitudes ainsi que les choix de ceux qui veulent suivre le Christ.

Le jeûne, la prière et l’aumône, tels que Jésus les présente dans sa prédication (cf. Mt 6, 1-18) sont les conditions et les expressions de notre conversion. Le chemin de la pauvreté et du manque (le jeûne), le regard et les gestes d’amour vers l’homme blessé (l’aumône), et le dialogue filial avec le Père (la prière), nous permettent d’incarner une foi sincère, une vivante espérance et une charité active.

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