Homélie du 21è dimanche du temps ordinaire – Année B

Chers frères et sœurs,

Une fois n’est pas coutume, je commenterai ce dimanche la deuxième lecture, tirée de la lettre de Saint Paul aux Éphésiens (5, 21-32). Ce texte était lu systématiquement aux messes de mariage avant la réforme liturgique qui a suivi le concile de Vatican 2. Or aujourd’hui, on ne l’y entend plus guère. En cause cette fameuse phrase : « Femmes, soyez soumises à vos maris » devenue inaudible dans notre société occidentale moderne, et c’est tout à fait compréhensible. C’est pourtant bien dommage car, contrairement à ce qu’une lecture trop rapide pourrait laisser penser, Paul ne prétend pas que l’homme soit supérieur à la femme. Et surtout, ce texte est un joyau, une magnifique méditation sur le mariage chrétien dont il pose les bases théologiques. J’aimerais montrer cela en parcourant brièvement avec vous ce passage du chapitre 5 de la lettre aux Éphésiens.

Le contexte dans lequel Paul écrit cette belle lettre est celui d’une société patriarcale où la femme n’était ni plus ni moins que la propriété de son mari. Or, si le mot « soumission » fait effectivement problème, la première phrase du texte (v.21) interdit, du fait de sa réciprocité, d’y voir une quelconque dimension de pouvoir : « Frères, par respect pour le Christ, soyez soumis les uns aux autres ». La soumission dont il est question ici est semblable à la « crainte de Dieu » dans l’Ancien Testament. On peut traduire ce mot par « respect » comme le fait le verset 331. Il s’agit d’une attitude d’humilité et d’écoute qui permet à l’autre d’être vraiment lui-même, de se dire et de s’épanouir en vérité et en confiance. La soumission dans le sens biblique, et plus particulièrement dans le sens paulinien, est une qualité de présence à l’autre. Il y a là l’idée d’une responsabilité qui nous incombe les uns vis-à-vis des autres. C’est, je pense, le sens même de la chasteté2 à laquelle tous les chrétiens, célibataires ou mariés, sont appelés.

Saint Paul compare le rapport mari/femme avec celui de la tête et du corps et aussi du Christ et de l’Église. Il reprend ainsi l’image du rapport nuptial entre Dieu et son peuple que les prophètes de l’Ancien Testament, et en particulier Osée, ont développée. Mais Paul lui donne une nouvelle dimension et une densité inouïe. Ici, la femme n’est pas l’épouse infidèle de l’Ancien Testament : elle est pure comme tout chrétien passé par le bain baptismal3. Elle n’a « ni ride, ni tache, ni rien de tel » (v.27). Et d’ailleurs, n’en est-il pas ainsi, chers frères et sœurs, quand nous regardons notre conjoint comme un don de Dieu, que nous reconnaissons en lui, en elle, l’Esprit à l’œuvre ? Quelle merveille quand je peux dire à mon conjoint, même après de très nombreuses années de mariage : « Tu m’étonneras toujours ! » ou encore : « tu restes un mystère pour moi ». Le mystère au sens chrétien du terme, c’est ce que je n’ai jamais fini de découvrir et qui me dit la présence agissante de Dieu.

En fait, non seulement Paul ne sous-entend aucun rapport de pouvoir et de domination de l’homme sur la femme, mais au contraire, s’adressant majoritairement à des hommes, il leur pose, à eux, des exigences qui en ont très certainement choqué plus d’un : « Vous les hommes, aimez votre femme à l’exemple du Christ : il a aimé l’Église et il s’est livré pour elle » (v.25). Aimer jusqu’au don de soi, un don total et sans réserve, un don de toute sa vie jusqu’à mourir pour elle : voilà la tâche du mari ! Et Paul utilise l’image du corps pour illustrer son propos : l’époux est appelé à prendre soin de son épouse comme de son propre corps. L’aimer ainsi, nous dit Paul, c’est s’aimer soi-même (v.28). Quelle exigence, quelle magnifique exigence ! Certes, cela reste un idéal, mais si on arrive à accueillir avec humilité et un brin d’humour ses propres travers et ceux de son conjoint, il y a là un véritable chemin de vie. Paul jette alors un regard nouveau et profondément christique sur la première page de la bible : « L’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme et tous deux ne feront plus qu’un » (v.31), c’est-à-dire, une seule chair, une seule révélation ! Avec saint Paul, prenons la mesure de la grandeur et de la profondeur du sacrement de mariage, qui éclaire la relation de Dieu avec son peuple et celle du Christ avec nous : « Ce mystère est grand : je le dis en référence au Christ et à l’Église ! » (v. 32)

1 Dans le v.33 qui conclut ce texte et qui est curieusement omis par le lectionnaire, Paul reprend l’injonction faites aux époux de manière claire : « Chacun de vous, pour sa part, doit aimer sa femme comme lui-même et la femme, respecter son mari ».

2 Saint Ignace évoque bien cette attitude dans les Constitutions de la Compagnie de Jésus : « En tout, (les compagnons) s’efforceront et auront le désir de donner la préférence aux autres (…) et leur manifesteront avec simplicité (…) le respect et la révérence (…). Ainsi (…) chacun s’efforcera de reconnaitre [Dieu notre Seigneur] en l’autre comme en son image » (n°250).

3 Saint Paul fait allusion à la coutume des bains rituels que prenait la fiancée avant le mariage, qui avaient lieu à son époque comme encore dans beaucoup de cultures aujourd’hui.

FESTIVAL SACRÉE MUSIQUE MARSEILLE ÉDITION #1

11 CONCERTS, 4 LIEUX

C’est un tout nouveau festival qui se lance à Marseille ! Du 4 au 20 octobre 2024, Sacrée Musique propose des concerts de musique sacrée de tous styles, avec des artistes de très haut niveau, dans les plus beaux lieux de patrimoine. Chaque soirée est intégralement illuminée à la bougie pour offrir au public une expérience immersive tout simplement magique.

Après trois éditions à succès dans le Var, et le lancement de nouveaux festivals à Monaco, Lyon, Rome, ou encore Paris pour les Jeux Olympiques, le Festival se lance dans la belle ville de Marseille.

La Bonne Mère, l’Abbaye Saint-Victor, la Basilique du Sacré-Cœur et Saint-Ferréol sur le Vieux-Port… Dans ces lieux emblématiques de la Cité phocéenne, la programmation musicale est riche: le Spirituals Jazz Orchestra, un jazz-band New Orleans détonnant, le Gospel Philharmonic Experience qui mêle gospel et musique classique, le mythique Chœur de Sartène et ses polyphonies corses toujours aussi poignantes, le Chœur Philokalia tout droit venu du Liban et qui interprète des chants d’Orient pour la paix, les Arméniennes du Trio Nazani, trois jeunes femmes aux voix célestes, le Chœur Région Sud avec une Misa Tango pleine de chaleur et de passion pour un voyage direct vers Buenos Aires, le duo formé de la mezzo-soprano Daphné Souvatzi et du guitariste flamenco François Aria nous mènera sur les rives de la Grèce et de la Méditerranée, le quatuor d’hommes Aïlack et ses impressionnantes polyphonies slaves, et pour finir, l’ensemble Dulci Jubilo, jeunes chanteurs surdoués incarnant la nouvelle génération du chant choral classique.

Sacrée Musique a aussi pris une orientation éducative et solidaire qui fait partie de sa raison d’être. Cela passe par exemple par l’organisation d’ateliers musicaux pour les élèves du Conservatoire Pierre Barbizet ou avec des associations comme le réseau La Source, qui s’occupe de jeunes et de familles en précarité dans les quartiers Nord de Marseille.


Retrouvez le Spirituals Jazz Orchestra le 4 Octobre 2024 pour 2 concerts à 19h45 et 21h au sanctuaire Saint-Ferréol les Augustins.

Beau festival à tous !

LIEN DE LA BILLETERIE

SPIRITUAL JAZZ ORCHESTRA

Fusion captivante de chants gospel et de jazz traditionnel de la Nouvelle-Orléans. Les chants qu’on appelle «spirituals» sont nés au sein de l’église invisible, chantés par des Africains qui se rencontraient dans des lieux secrets. Ces chants explorent les thèmes de la souffrance du peuple esclave & de l’espérance de la libération promise de génération en génération.
Venez découvrir le quartet Spiritual Jazz Orchestra lors de deux concerts le 04 Octobre 2024 à 19H45 et 21H au sanctuaire
Saint-Ferréol, 1 Quai des belges, 13001

Homélie du 16ème Dimanche année B

… en guise de relecture de l’occupation de l’église Saint Ferréol sur le Vieux-Port à Marseille, du samedi 13 juillet au vendredi 19 juillet 2024..

(Mc 6, 30-34). 

Pour nous qui ne sommes pas encore en vacances, les semaines vsemblent s’allonger, la fatigue se fait sentir et nous attendons que prenne effet cette parole réconfortante que Jésus adresse aux apôtres de retour de mission : « Venez à l’écart dans un endroit désert, et reposez-vous un peu ». 

Mais, il y a juste une semaine, un peu avant la messe du samedi, une cinquantaine de jeunes migrants se sont installés dans notre église pour attirer l’attention des pouvoirs publics sur le fait qu’ils se retrouvent, mineurs ou tout juste majeurs, à la rue. La plupart d’entre eux va à l’école, est en apprentissage ou travaille au noir. Après avoir traversé le désert, après avoir connu la faim et la soif, après avoir été exploités et torturés pour certains, après avoir risqué leur vie en embarquant dans un bateau de fortune, alors qu’ils ont vu tant de leurs compagnons périr en mer, dans le désert ou sous les coups, ils ont échoué sur nos côtes. Ils espèrent enfin pouvoir construire chez nous leur vie et s’intégrer dans notre société par le biais de l’école et du travail. Mais les voilà ballotés d’un abri à l’autre, vivant dans des squats ou à la rue. Ils sont cependant épaulés par de jeunes bénévoles engagés à leurs côtés, parfois jour et nuit. Alors que bien de leurs amis passent un temps de vacances paisible et reposant, ces étudiants ont choisi de se faire les prochains de ces jeunes rejetés.  

En voyant tous ces jeunes exilés assis sur les chaises de l’église samedi dernier, j’ai ressenti une immense fatigue : nous avions déjà vécu une situation similaire en Octobre dernier, peu après la venue du Pape à Marseille : elle nous a demandé beaucoup d’énergie .Mais là!

En plus c’est l’été : nous sommes en effectifs réduits, les prêtres comme les laïcs engagés. La perspective pour moi de devoir être présent dans l’église non seulement le jour, mais aussi le soir et même la nuit me décourageait. En plus, cela impliquait l’annulation de bien des activités et des rendez-vous qu’il faudrait récupérer par la suite.

Qu’elle semblait loin cette parole du Christ nous invitant à prendre du repos à l’écart !

Comme pour Jésus et les apôtres, qui voient la foule les précéder à pied alors qu’eux sont en barque, le repos promis n’aura pas lieu, pas encore. En effet, comment ne pas ressentir à la vue de ces jeunes, la même compassion que Jésus, littéralement pris aux tripes par les foules qui sont « comme des brebis sans berger ».

La semaine a été difficile, éprouvante pour beaucoup, pas seulement pour nous, jésuites, pour la sœur, les bénévoles, mais aussi pour vous, fidèles, pour les touristes qui demandaient ce qui se passait et bien entendu surtout pour les jeunes eux-mêmes et les bénévoles qui les aident à garder la tête au-dessus de l’eau.

L’occupation de notre église a servi de creuset au contexte politique tendu que nous vivons en France. Il fallait tenir tête à l’extrême droite qui n’a pas manqué l’occasion pour proférer des menaces contre les jeunes migrants, mais aussi aux groupuscules d’extrême gauche qui se sont incrustés et ont tenté de récupérer la colère et la frustration des jeunes exilés à des fins polémiques.  

Et puis hier vendredi, tout est rentré dans l’ordre : les jeunes ont été « mis à l’abri » selon la formule consacrée, l’église s’est vidée, tout a été rangé et nettoyé par les bénévoles, mais aussi par plusieurs personnes engagées au service de notre sanctuaire : un grand merci à elles !  

Nous sortons « rincés » de cette semaine riche pourtant, pleine de rebondissements.  Épuisés, nous avons cependant bu au puits de la solidarité. Pour tenir le coup, il était important de rester en humble place, tout en assumant nos responsabilités, et de faire confiance au Seigneur, car Lui seul nous donnera le repos ! Ainsi pouvons-nous rendre grâce à Dieu pour ce temps d’épreuve qui nous a fait grandir dans la joie de l’Évangile !

Amen. 

Vincent Klein Sj.