Méditer l’évangile de ce dimanche avec le service diocésain de la vie spirituelle en contemplant Marseille
L’ expresso du dimanche
Voulez-vous petit-déjeuner avec moi ?
Ils s’appellent Ferhat, Emmanuel, Maria ou encore le « roi des clochards » ou la « reine de la rue ». Ils sont jeunes ou déjà avancés en âge, seul ou avec des amis, parfois avec un animal de compagnie, comme on dit. Nous nous appelons Thérèse, Nina, Anna, Steves, Cristina, François-Xavier, Martine, Thierry… Nous sommes du groupe des apprentis de l’abbé Fouque ou des membres de la communauté chrétienne de Saint-Ferréol.
Qu’est-ce qui nous réunit en ce dimanche matin ? La rue, les quais, les trottoirs… Ces lieux où les uns vivent le jour comme la nuit, et où d’autres se tiennent le temps d’un café et d’un croissant partagés pour un petit-déjeuner.
L’initiative est née du formidable travail entrepris par Charles-Henri Garié, récent délégué de l’archevêque à la solidarité. Après avoir recensé toutes les aides qui existaient déjà et mis en réseau les élans de générosité déjà nombreux, plusieurs manques lui sont apparus. Avec l’aide d’Aymeric O’Neill de La Source, il en a repéré un qu’ils ont baptisé « L’expresso du dimanche matin » : sur le parvis d’une église, inviter fidèles et personnes de la rue à prendre ensemble un petit-déjeuner. Saint-Ferréol s’est de suite emparé de cette idée toute simple et géniale. L’expresso était né.
Dans la sacristie de Saint-Fé déjà transformée en atelier de couture pour fabriquer des maques, deux machines à café et une bouilloire sont en marche dès 8h, croissants frais achetés à côté, madeleine, brioche, confiture de myrtille, mais aussi petit sac anti-covid avec maques, savon de Marseille et mouchoirs jetables sont prêts. 8h30, la table est dressée devant l’église et nous partons à la rencontre de celles et ceux qui sont en train de se réveiller.
Là, quatre jeunes à l’abri du vent avec vue imprenable sur le Vieux-Port : la discussion s’engage très vite, l’échange de bonnes adresses où se doucher aussi. L’odeur du savon de Marseille les réjouit. Plus loin, un solitaire bourru : un café, un croissant. » Merci « , seule parole avec grand sourire. Chacun sa dynamique matinale !
Devant le magasin Hema, petit attroupement. Commande vite passée, livraison « à domicile », puis longue conservation où arrive la question « Sais-tu où je peux me faire soigner les dents ? »
Devant l’église des habitués des centres d’aide et d’hébergement arrivent; ils sont déjà connus par certains d’entre nous. On s’assoit, on discute, on échange sur la manière dont s’est passé le confinement, et la compréhension de la police : « Ils ont été sympas ».
La café et l’eau chaude manquent vite. Retour express à la sacristie. Entre temps, d’autres arrivent devant l’église. Rires et bonheur exprimé devant la brioche tartinée avec de la confiture… Le tout en allemand entre Maria et Anna.La langue maternelle, cela fait du bien ! Parfois, le petit-déjeuner prend des allures de retrouvailles improbables, sans doute celle avec la fraternité un temps oubliée. L’étonnement est là : « Tiens, je croyais que les jésuites faisaient des longues études… Cela conduit aussi à la rue ? » Rires partagés.
Sur la fin du petit-déjeuner, les équipes du Secours Populaire passent devant Saint-Fé. Nouveaux échanges, nouveaux liens de solidarité tissés.
Vient le temps de tout ranger, de revenir dans la sacristie pour nettoyer et rendre grâce au Seigneur. Quel bonheur de voir que le respect des gestes barrières n’empêche pas la proximité et la chaleur humaine. Vivement dimanche prochain pour aller à la rencontre de nos futurs amis en leur demandant : « Voulez-vous petit-déjeuner avec moi ? »
Thierry Lamboley sj
6ème dimanche après Pâques
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