Homélie du P. François Boëdec, Provincial, 31 octobre, à Saint Ferréol, Rassemblement « Avance au Large »

Chers amis,

Cet évangile nous présente une belle scène. Une vraie rencontre, un havre de paix au milieu des discussions tendues que Jésus a souvent avec ceux qui s’opposent à lui. Ici, entre le scribe et Jésus, pas d’arrière-pensée, mais une conversation pour avancer vers l’essentiel. Quel est le plus grand des commandements ? Autrement dit : qu’est-ce qui est le plus important dans la vie ? Sans hésiter, Jésus cite la prière traditionnelle du Shema Israël que son interlocuteur connaît depuis l’enfance. Le premier commandement qu’il rappelle, en contient en fait deux, puisque la citation du Deutéronome commence par l’invitation : « Ecoute ». « Ecoute, Israël, » – et se poursuit par : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu ». Mais Jésus ne s’arrête pas là. Il ajoute un autre commandement du Lévitique : « Tu aimeras ton prochain ». Jésus commande à nouveau d’aimer, mais l’objet de cet amour est cette fois le frère.

Le scribe connaît tout cela. Il sait l’absolu de Dieu, il sait que Dieu est l’unique. Et Jésus se réjouit de voir cet homme qui a cette connaissance. Mais il perçoit aussi qu’il n’a pas encore complètement franchi la distance qui le sépare de Dieu : « Tu n’es pas loin du Royaume de Dieu ». C’est à dire : « tu n’y es pas complètement, continue… ». Tout le contraire de ce que le larron sur la croix s’entendra déclarer : « Aujourd’hui, tu seras avec moi dans le Paradis ! » Mais pourquoi ce scribe est-il donc à distance du Royaume ? Pourquoi ce « tu n’es pas loin » que nous pouvons entendre pour notre propre vie ? Comme pour le jeune homme riche de l’évangile, il y a quelque chose qui manque à cet homme.

Le jeune homme riche, vous vous souvenez, demande à Jésus « que dois-je faire pour avoir la vie ? ». Le scribe, lui, semble prisonnier de son savoir. A force de scruter les Ecritures, il sait tout des commandements ; il est capable d’en débattre savamment : aimer Dieu, aimer le prochain, et les liens entre ces deux amours. Cette compréhension est précieuse dans les enjeux qui travaillent nos sociétés. Mais on ne peut en rester là. Aujourd’hui comme hier, il faut agir et engager sa vie.

Alors, pour ne pas rester enfermé dans des réflexions solitaires, il faut revenir au premier mot : « Ecoute ». C’est lui qui donne la clé. Jésus ne dit pas : « Lis, tout a déjà été écrit », comme s’il n’y avait qu’à connaître un texte, un credo, un catéchisme, pour vivre… Il ne dit pas « lis », il dit « écoute », tends l’oreille de ton cœur. Nous sommes ici entre des personnes qui s’adressent l’une à l’autre, qui ont des choses à se dire et qui franchissent par la parole la distance qu’il y a entre eux. Ecouter, c’est laisser entrer en soi ce que l’autre veut nous dire, ce qu’il donne de lui, et s’en laisser modifier. C’est la manière de faire de Dieu. Ecoute Israël, tu aimeras… C’est l’écoute du Seigneur qui donne d’aimer. Et c’est cela le plus important. Parce que personne ne peut vraiment vivre sans être aimé.

En fait, frères et sœurs, dans cette scène, l’évangile ne nous parle pas seulement de la quête du scribe qui est celle de toute l’humanité, il nous parle aussi de Dieu. Dieu qui le premier désire être aimé de l’homme, et qui le premier s’est engagé dans cette relation. La passion de Jésus, c’est cet amour rejeté, refusé. La Résurrection, c’est la révélation que Dieu nous aime plus fort que nos refus. Le Seigneur nous demande de nous attacher à lui parce qu’il veut que nous vivions. Et il peut nous faire cette demande parce qu’il s’est déjà attaché à nous. Il ne vole pas notre liberté, il engage la sienne et – c’est là le paradoxe évangélique -, il nous fait découvrir la liberté profonde qu’il y a à engager la nôtre envers lui. Jésus est celui qui vit ensemble l’amour de Dieu et du prochain, et qui nous rend capables de le vivre aussi dans les réalités de notre vie.

Alors, que faisons-nous ? Sommes-nous prêts à nous décider pour lui ? De tout notre cœur, de toute notre âme, de tout notre esprit et de toute notre force ?

« Donne-moi seulement l’amour », demandait St Ignace de Loyola dans sa prière au Seigneur. Chacun de nous peut reprendre cette prière dans son cœur : elle met sur le chemin de la fraternité et de la résurrection.

                                                     P. François Boëdec sj, Provincial d’EOF

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La Toussaint: la sainteté cachée

Dans la deuxième lecture [1 Jean 3, 1-3], le jour de la Toussaint, nous entendrons proclamer : « Dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement ». Cette espérance qui se réalise déjà est celle de chacun d’entre nous, car nous sommes tous déjà « enfants de Dieu » et à ce titre nous participons déjà à la sainteté de Dieu.

La fête de la Toussaint n’est donc pas uniquement une fête pour se souvenir des merveilles de Dieu accomplies hier à travers quelques-uns [même si les saints canonisés sont très nombreux], mais c’est bien notre fête à tous, désireux aujourd’hui de toujours laisser percevoir l’œuvre de Dieu dans nos vies. Certes, il y a encore un chemin à parcourir mais l’important n’est pas la fin du voyage [elle est entre les mains du Père qui nous aime] ; ce qui compte, c’est notre manière de voyager, autrement dit notre manière d’être homme ou femme dans la société, s’efforçant de laisser entrevoir qui est Dieu, quel est son amour, quel bonheur il veut pour chacun. Nous sommes déjà « sacrements de la sainteté de Dieu ». Un sacrement est un signe visible qui dit une réalité invisible qui le dépasse de toutes parts. Quand nous œuvrons dans la société – comme citoyens… en famille comme père, mère, frère, sœur, fils ou fille… sur le lieu professionnel comme collègues, cadres, employés, entrepreneurs… dans notre communauté chrétienne quels que soient notre état de vie et notre service [ministère]… – pour que la volonté de Dieu, révélée en sa Parole, soit toujours plus manifeste, nous sommes sacrements de la sainteté de Dieu.

De ce fait, la fête de la Toussaint est une action de grâce pour ce que Dieu fait / a fait en nous, par nous [parfois à notre insu] et une espérance, car à cette lumière nous sentons que nous sommes invités à aller plus avant encore en cette intimité divine qui se dira à travers notre quotidien le plus banal. La sainteté n’est pas un exercice où il nous faudrait constamment flirter avec l’impossible, mais elle est une manière de vivre le possible, en nous laissant guider par l’Esprit dont le fruit est : « amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, foi, douceur, maîtrise de soi » [Galates 5, 22-23].

Dès lors des saints, nous en croisons chaque jour, comme le rappelait le Pape François lors de l’audience générale du 14 mai 2014 : « Nous aussi, nous tous, nous connaissons des personnes qui ont vécu des situations difficiles, beaucoup de souffrance. Mais pensons à ces hommes, à ces femmes qui mènent une vie difficile, qui luttent pour faire vivre leur famille, éduquer leurs enfants : ils font tout cela parce que l’Esprit de force les aide. Tous ces hommes et ces femmes – nous ne savons pas leur nom – qui honorent notre peuple, qui honorent notre Église parce qu’ils sont forts : forts pour mener leur vie, leur famille, leur travail, pour vivre leur foi. Ces frères et sœurs sont des saints, des saints au quotidien, des saints cachés parmi nous : ils ont précisément le don de force pour accomplir leur devoir en tant que personnes, leur devoir de pères, de mères, de frères, de sœurs, de citoyens. Ils sont très nombreux. Remercions le Seigneur pour ces chrétiens dont la sainteté est cachée : c’est l’Esprit-Saint qui est en eux et qui les pousse ».

Ouvrons les yeux pour contempler la sainteté de Dieu qui traverse notre vie, sans oublier que cet appel à la sainteté concerne chacun, comme le rappelait/rappelle le concile Vatican II : « Il est donc bien évident pour tous que l’appel à la plénitude de la vie chrétienne et à la perfection de la charité s’adresse à tous ceux qui croient au Christ, quels que soient leur état ou leur rang ; dans la société terrestre elle-même cette sainteté contribue à promouvoir plus d’humanité dans les conditions d’existence. Les fidèles doivent appliquer les forces qu’ils ont reçues selon la mesure du don du Christ, à obtenir cette perfection, afin que marchant sur ses traces et devenus conformes à son image, accomplissant en tout la volonté du Père, ils soient avec toute leur âme voués à la gloire de Dieu et au service du prochain. Ainsi la sainteté du peuple de Dieu s’épanouira en fruits abondants, comme en témoigne avec éclat l’histoire de l’Eglise par la vie de tant de saints » [Lumen gentium, n. 40].

Alors la fête de la Toussaint peut être un temps pour se réjouir pour ceux qui sont la trace de Dieu sur nos chemins et nous réjouir aussi d’être déjà sur cette route. Dieu nous précède. Marchons avec lui, comme des « enfants » avec leur Père.

Jean-Luc RAGONNEAU s.j

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Vers une église synodale

Pour avancer tous ensemble sur ce chemin, nous mettons en place à
St- Ferréol différents groupes de réflexion sur des thèmes tels que :

  • Ecoute, dialogue et mission,
  • Coresponsabilité et écoute de l’Esprit Saint,
  • Ecouter la Parole, méditer et célébrer.
    Pour favoriser les échanges, nous nous appuierons sur les groupes
    déjà existants comme le groupe du P. Pierre de Charentenay ou encore le
    Café Spiritualité du 3ème jeudi du mois à 13h00.
    Toutes les équipes de notre sanctuaire seront par ailleurs invitées à réfléchir sur l’un ou l’autre des thèmes proposés.
    Nous invitons toutes celles et ceux qui, en dehors des équipes de Saint-Ferréol, sont intéressés pour cheminer avec nous et vivre cette démarche d’écoute et de dialogue.
    Vous pouvez vous inscrire au bureau d’accueil ou bien à l’adresse mail de Saint-Ferréol.
    Une proposition de date de rencontre vous sera faite très prochainement.
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