Un profond silence se répand comme une huile sur la plaie béante offerte au soin de tes mains délicates et expertes.
Dans l’anfractuosité des cœurs brisés s’éprouve l’indigence où Tu prononces une seule parole : heureux !
L’humanité pleure, sidérée par la violence fanatique, la solitude de l’abandon et la détresse de la mort innocente.
Et Toi, tu viens t’asseoir discrètement à nos côtés, présence consolante qui murmure dans la béance de l’orifice : heureux !
La haine et la vengeance défigurent l’humanité, la douceur et la bonté ressemblent à des épées de bois.
Toi pourtant, tu nous redis la folle promesse d’une terre : heureux !
Des années de colère refoulée devant tant de souffrance et d’injustice mettent l’estomac en boule.
Mais Toi, faisant fi de la faim et la soif, tu nous conduis vers la source : heureux !
Même si justice est faite, comment pardonner ? Toi, tu nous invites à refuser la haine et à garder nos maisons pauvres et accueillantes.
À travers nos frères, tu viens à notre rencontre : heureux !
Une orgie d’images de chair et de sang déferle sur nos écrans et des torrents de paroles futiles. Elles sont autant d’invitations à prendre le maquis…
Et là, comme à Job, Tu nous donnes de contempler la création : heureux !
Ton feu dévorant nous pousse à nouveau, dérisoires bâtisseurs de ponts aux mains nues, à construire des chemins de paix.
Peu à peu, mystérieusement, nous devenons frères, fils d’un unique Père : heureux !
Alors, au-delà des persécutions, des insultes ou des condamnations, Tu nous redis, si nous nageons à contre-courant, le chemin de la joie pascale. Elle plonge ses racines dans le silence d’où jaillit une parole que les larmes ont polie : heureux !
P. Vincent Klein sj