Homélie du 18 avril 2021

A vous d’en être des témoins

Qu’est-ce que cela veut dire aujourd’hui être des témoins?

C’est raconter ce qu’on a vu. C’est ce que fait le témoin à la barre dans un tribunal. On lui demande de dire les faits de manière la plus précise possible. Et s’il manipule ces faits avec quelques arrière-pensées, il peut être accusé de faux témoignage. Jésus appelle à être des témoins. Il demande que les apôtres racontent ce qu’ils ont vu. Vous remarquerez que Jésus prend un luxe de précautions pour qu’il n’y ait pas de doute sur sa résurrection. « Regardez ». « Regardez mes mains et mes pieds ». Et voyez que je mange du poisson grillé. Je ne suis donc pas un fantôme. Les fantômes ne mangent pas ; moi, je mange. 

Voilà la scène dont nous discutons. Elle s’est déroulée il y a 2000 ans. Mais le récit nous est parvenu jusqu’à maintenant, ce qui nous permet, nous, d’affirmer que Jésus est bien ressuscité. Mais quand nous entendons cette demande d’en être les témoins, ce n’est pas tout à fait la même chose que pour ceux qui étaient les témoins vivants. Nous ne pouvons pas témoigner de ce que nous avons vu, puisque nous n’avons pas vu. Et pourtant la demande du Christ reste toujours bien réelle : à vous d’être les témoins de la Résurrection du Christ. Comment cela est-il possible à 2000 ans d’intervalle ? 

Notre manière de voir le Christ passe par divers canaux : la foi et la rencontre personnelle avec lui, la parole de l’Eglise, l’Ecriture et la manière dont vivent les chrétiens.  

Je voudrais m’arrêter d’abord sur cette relation à l’Ecriture. L’Evangile nous disait que Jésus avait ouvert l’intelligence des apôtres à la compréhension des Ecritures. C’est dans la lecture de l’Évangile et de l’Ancien Testament que nous comprenons qui est le Christ et ce que signifie sa résurrection. Cela veut dire que nous devons faire un effort de lecture de l’Ecriture et d’intelligence de la foi. Pour beaucoup de gens aujourd’hui l’Ecriture est encore très ignorée, et la foi se réduit parfois, pas toujours, à ce que nos grand-mère racontaient, à des exigences morales qui datent de notre petite enfance.  Être témoin, c’est commencer à réfléchir, à interpréter l’Ecriture et à mettre de l’intelligence dans sa foi et à être capable de l’expliquer. Faites un test : en six mois, depuis le mois d’octobre combien de livres avez-vous lu dans l’Ancien ou le Nouveau testament ou sur la Bible ? Ce n’est pas le seul critère, mais c’est un critère objectif qui nous dit l’état de travail de notre cerveau dans ce domaine.

  Je voudrais m’arrêter sur une deuxième manière de témoigner de la Résurrection du Christ. C’est la manière dont nous vivons les exigences de l’Évangile aujourd’hui, ces exigences concrètes que l’on peut observer dans la cohérence, et la transparence de notre propre vie. Le contre témoignage le plus dramatique est l’incohérence entre nos paroles et nos actes. Nous venons fidèlement à la messe et nous récitons des prières mais nous fermons les yeux sur la réalité de la pauvreté et des inégalités dans notre pays, et nous sommes surtout intéressés à sauvegarder notre patrimoine financier. Dans un autre domaine, les cas de pédophilie dans l’Eglise, les grandes affaires médiatiques que nous voyons sortir, c’est cela, cette incohérence, qui fait le plus de mal au témoignage de la Résurrection.   « À vous d’en être les témoins ». Nous voyons ainsi toutes les conséquences que peut avoir dans nos vies cette nécessité du témoignage de la Résurrection du Christ. C’est un appel dynamique qui nous pousse à approfondir notre foi et à la pratiquer en vérité. 

Pierre de Charentenay, sj

St-Ferréol, le 18 avril 2021

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