Homélie du 30ème dimanche Année B (27 octobre 2024)

Jéricho est une des plus anciennes villes du monde ; son existence remonterait à environ 9000 an av. J-Chr. C’est aussi la ville la plus basse du monde puisqu’elle se situe à près de 300m sous le niveau de la mer, à proximité de la mer Morte. Pour monter à Jérusalem, il faut donc parcourir un dénivelé de plus de 1000m, sur une route de montagne sinueuse qui était à un véritable coupe-gorge, comme nous le rappelle la parabole du bon Samaritain.

Jésus se trouvait à Jéricho. Il y avait annoncé une troisième et dernière fois sa passion alors que ses disciples se disputaient les premières places dans le Royaume de Dieu ! Et voilà qu’il sort de la ville, entouré par une foule : apôtres, disciples, petites gens, curieux et sans doute des opposants également. Et là, un mendiant, qui visiblement avait pris ses quartiers à la porte sud de la ville, entend que le bruyant cortège qui s’était formé était dû au passage de Jésus qui se rendait à Jérusalem.

Chose intéressante, ce mendiant a un nom ou du moins, il est nommé d’après son père :Bar-Timée, c’est-à-dire le fils de Timée. Et il interpelle Jésus en reconnaissant sa royauté messianique : “Fils de David, Jésus“. Le fils de Timée reconnaît en Jésus le fils du grand roi David. Notre évangile est une histoire de filiation. Jésus se rend à Jérusalem, ville où le roi David a son tombeau. D’ailleurs le texte qui suit immédiatement notre évangile, au chapitre 11, c’est le récit de l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem qui, monté sur un âne, sera acclamé comme roi : “Hosanna (c’est-à-dire : “donne le salut“) ! Béni soit au nom du Seigneur celui qui vient. Béni soit le règne qui vient, le règne de David, notre Père“. A Jéricho, Jean et Jacques avaient demandé à Jésus de siéger à sa droite et à sa gauche dans sa gloire. Mais Jésus leur avait répliqué que le Fils de l’homme, un titre messianique qu’il s’est donné à lui-même et qui porte de nouveau sur une question de filiation, le fils de l’homme donc, n’est pas venu pour être servi mais pour servir. Comme les apôtres, Bartimée reconnait la messianité de Jésus, mais sa demande est celle d’un humble mendiant qui cherche simplement à rencontrer personnellement le Christ : “Fils de David, Jésus, aie pitié de moi !“, en grec : “kyrie éleison !“ Le priant, le croyant qui prie, n’est-il pas d’abord et avant tout un mendiant, un mendiant d’amour ou dit autrement, peut-on être croyant, homme ou femme de prière, si on ne se reconnaît pas avant tout indigent, mendiant de la bonté, de la miséricorde divine ? Alors que la foule rabrouait Bartimée pour qu’il se taise, Jésus, lui, s’arrête et le fait appeler.

La foule, obstacle à la rencontre, devient une passerelle, un canal qui conduit vers Jésus avec ces paroles magnifiques : “Confiance, lève-toi, il t’appelle“. Arrêtons-nous maintenant quelques instant si vous le voulez bien et appliquons cette situation à a vie de foi : quand est-ce que dans ma vie la foule, les gens, les “on dit“ ont été un obstacle à la rencontre du Christ ? Comment ai-je fait pour dépasser cet obstacle ? Au contraire, quelles sont les personnes, les groupes qui m’ont aidé, qui ont été des guides pour que je puisse rencontrer le Christ : “Confiance, lève-toi, il t’appelle“. Et de mon côté, ai-je été un obstacle pour que des personnes rencontrent le Christ ? Ou bien au contraire, j’ai pu être une aide pour mon prochain, un canal de sa grâce pour d’autres ?

Revenons au texte. Voilà que Bartimée “rejetant son manteau, se leva et courut vers Jésus“. Le manteau qu’il rejette, c’est ce qui littéralement lui collait à la peau : on ne se séparait pas de son manteau, surtout si on vivait à la rue. Ce manteau symbolise donc pour l’aveugle son histoire de galère, son passé de souffrances de pleurs et de sueur. Bartimée, nous dit le texte, le rejette pour se lever enfin et courir vers la source de vie. Plus tard sans doute quand, guéri, il relira sa vie, il jettera avec d’autres son manteau sur la route au passage de Jésus qui entrera triomphalement à Jérusalem. Alors, plutôt que de rejeter en bloc son passé, réconcilié avec son histoire grâce à la rencontre avec le Christ, il l’offrira à Celui qui est devenu le sens de sa vie, le roi de gloire. Mais c’est pour plus tard. Dieu est patient.

Le dialogue entre le fils de l’homme, fils de David, et le fils de Timée, est très sobre :

  • Que veux-tu que je fasse pour toi ?
  • Rabbouni, que je retrouve la vue.
  • Va, ta foi t’a sauvé.

Pas un geste, pas une parole de guérison de la part de Jésus, mais on devine très bien l’émerveillement simplement évangélique du Christ devant la foi, le courage et la persévérance de ce mendiant aveugle qui se lève, se détache des entraves de son histoire, traverse la foule en courant et se tient devant Jésus : il retrouve sa dignité de fils de Dieu, il sort des ténèbres et voit Jésus qu’il va suivre désormais : “Va ! Ta foi t’a sauvé“. Nous sommes aux antipodes d’une guérison magico-miraculeuse. Le regard plein d’amour et d’admiration du Christ et ses mots suffisent pour remettre debout et rendre la vue.

Oui, chers frères et sœurs, la rencontre du Christ que nous désirons du plus profond de notre cœur, nous relève, nous permet de changer de vie et d’y voir clair, comme à la sortie d’un long tunnel : le paysage a changé, la vie retrouve toute sa saveur. Oui, le monde est entre les mains de Dieu, n’ayons pas peur de nous lever, de rejeter le manteau de nos doutes et de nos résignations et suivons Jésus sur le chemin. Nous y rencontrerons sûrement bien des Bartimée !

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L’église Saint-Cannat

L’église relève du Rectorat Saint-Férréol-Saint-Cannat confié par l’archevêque de Marseille à la Compagnie de Jésus en septembre 2017.

En 1524, les troupes impériales commandées Charles III de Bourbon s‘approchent de Marseille. Pour défendre la ville, le couvent des Prêcheurs situé à l’extérieur des remparts, à l’ouest de l’actuelle rue Saint-Ferréol, est rasé. Marseille n’est pas prise et les Dominicains font construire un nouveau couvent à l’intérieur de l’enceinte, sur le futur site de l’hôtel des Postes. Le chantier débute en 1526. Une première tranche des travaux reçoit en 1528 la bénédiction de évêque de Girone Guillem Ramon Boïl qui avait été capturé par les galères françaises et attendait d’être rapatrié. L’église n’a été consacrée qu’en 1619. Son financement s’était révélé difficile, malgré un don du corps des notaires.

La façade d’un style baroque tardif, a été réalisée en 1739 par l’architecte Joseph Gérard et le sculpteur Antoine Duparc. Elle a été démolie pour partie en 1926.

Les travaux de percement de la rue Impériale, future rue de la République, l’avaient ébranlée. Le fronton représentant l’Annonciation, soutenu par quatre colonnes et des pots à feu, a disparu. Restent une petite balustrade, les colonnes doriques inférieures et les statues des papes dominicains Pie V et Benoît XI. Depuis la destruction du fronton, rien ne rappelle que du temps des Prêcheurs, l’église était dédiée à l’Annonciation.

A la Révolution, le couvent est vendu comme bien national puis démoli. Seule subsiste l’église qui devient paroissiale en 1802, sous le vocable de Saint-Cannat, évêque de Marseille au 5ème siècle.

L’intérieur de l’église accueille un ensemble de tableaux, de sculptures et du mobilier d’une très grande richesse.

Quand on pénètre dans l’église, le magnifique autel à baldaquins s’impose au premier regard. Il a été réalisé pour la chapelle du couvent des Bernardines, aujourd’hui théâtre, et a été déplacé à Saint-Cannet en 1801. Réalisé en marbres polychromes par Dominique-André Fossati en 1755, il est classé Monument historique (MH).

Un intéressant tour de l’église permet de découvrir les chapelles :

– à gauche du portail, derrière une grille, un tableau de Sainte-Cécile, patronne des musiciens et à droite un tableau : Jésus chassant les marchands du temple,

– Dans la première chapelle à gauche, un baptistère en marbre blanc et un tableau représentant le Baptême du Christ attribuée à Pierre Parrocel (1670-1739), classé MH. La chapelle est fermée par une grille en fer forgé du 18ème siècle, classée, utilisée sans doute en réemploi. Elle n’est pas exactement adaptée à l’espace à clôturer. La chapelle accueille une statue de la Vierge,

– La troisième chapelle à gauche, décorée de lambris en bois, ensemble classé MH, est celle des notaires. La chapelle de leur confrérie se trouvait avant la révolution dans l’église des Accoules. Elle accueille un tableau de Michel Serre (1658-1733) représentant la Purification de la Vierge (ou Présentation de Jésus au Temple), classé MH,

– Dans la première chapelle à droite se trouve un tableau de Jean Bronzet (1810-1876), représentant la Vierge à l’Enfant et saint Dominique,

– La deuxième chapelle, à droite, accueille la Vierge à l’Enfant et le Purgatoire, de Michel Serre, classé MH.

Dans la nef, à gauche, la chaire en noyer finement sculptée, a été réalisée en 1691 par le sculpteur marseillais Albert Duparc (1661-1721). L’abat-voix est soutenu par des angelots. L’ouvrage est classé MH.

Le buffet d’orgue en deux corps, œuvre du facteur d’orgue dominicain Jean-Esprit Isnard (1707-1781), date de 1746. Classé MH, il est encadré par un garde-corps en fer forgé et partiellement doré de Forty, classé MH.

Texte Pierre Besserrer, photos Steves Babooram, Pierre Besserer et Adolphe Terris – archives départementales 13

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Homélie du 28è dimanche du temps ordinaire – Année B – Saint-Cannat

Un commentaire juif raconte l’histoire d’un jeune homme qui vient voir le rabbin car il n’arrive pas – dit-il – à sortir de sa tristesse. Après l’avoir longuement écouté, le rabbin lui tend un miroir et lui demande : « que vois-tu ? ». Le jeune homme lui répond : « moi-même ». Ensuite, le rabbin l’emmène près de la fenêtre et lui pose la même question : « que vois-tu ? ». Et l’homme de répondre : « je vois les gens qui vont et viennent dans la rue ». Et le rabbin de poursuivre : « Selon ce que tu mets sur ce morceau de verre, de l’argent pour qu’il devienne miroir, ou rien, ta vie est ainsi fermée ou ouverte, renfermée sur toi-même ou tournée vers les autres, triste ou joyeuse ».

Cet homme de l’évangile qui vient voir Jésus est dans l’impasse. Mais au moins, il cherche, il questionne ! Que dois-je faire ? A cet homme, possédé par ses possessions – car la richesse possède celui qui l’a, d’une manière ou d’une autre – Jésus propose un autre trésor, celui qui est dans le ciel. Quel trésor préférons-nous ? Celui des choses possédées ? Ou celui du don, d’une vie donnée aux autres, à niveau de vérité et de justice ?

Seul Dieu appelle à la vie, à sortir des possessions mortifères. Il nous appelle à vivre à niveau d’essentiel, à la jointure de l’âme et de l’Esprit, comme dit l’auteur de la lettre aux Hébreux. Cette jointure, c’est tout simplement notre vie profonde, qui irrigue nos vies, qui nous aide à sortir de la superficialité des choses.

Mais alors, il va falloir accueillir cette Parole de Dieu, cette Parole de vie qui nous est donnée. Il va falloir que nous expérimentions le manque quand on croit tout avoir. Parmi toutes les voies proposées par la Tradition, l’Eglise a toujours tenu à ce que l’on puisse vivre, de manière libre et choisie, les vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance, marques du manque, dans la vie religieuse. Pas de manque, pas de nouveauté.

La Sagesse est ici présentée comme une aide au discernement, pour faire les choix qui rendent heureux, dans l’alliance avec Dieu. En tout cas, il s’agit de se mettre dans des dispositions d’accueil et d’écoute.

PMJ

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