Pentecôte 2021
Effusion de l’Esprit d’unité et de paix
Dans les rencontres internationales, chaque participant parle sa langue. C’est un principe toujours appliqué même si souvent on pourrait utiliser l’anglais. Mais comme tout le monde ne parle pas obligatoirement l’anglais, et surtout pour respecter les identités, chacun parle sa langue. C’est comme ça depuis Babel, cet événement que la Bible nous raconte pour nous montrer la division des hommes et la difficulté de se comprendre.
Alors pour surmonter Babel, on a longtemps fait appel aux traducteurs. Grâce à leurs compétences, des ponts peuvent être construits entre des mondes bien différents. Grâce aux traducteurs, des Finlandais peuvent parler à des Maliens ou des Chinois. Les Kazakhs pourront échanger avec des Grecs, etc.
Si le traducteur fait ainsi le pont et le trait d’union entre les langues, il n’en reste pas moins que les différences demeurent. L’incompréhension est toujours possible. Je peux comprendre les mots que mon interlocuteur prononce, mais je ne comprends pas forcément son point de vue. Je peux même entrer en conflit avec lui parce que nos intérêts sont opposés.
Les nationalismes se réveillent, les volontés de puissance s’expriment, et soudain c’est la guerre, comme on le voit de manière lamentable entre Israël et la Palestine en ce moment. Ce n’est évidemment pas simplement une différence de langue. Nous retournons à Babel, à l’orgueil des hommes qui les a montés les uns contre les autres, à la volonté de puissance, aux désirs de conquête. Fini le temps des traducteurs qui créent des ponts. C’est le temps des canons et des destructions.
La Pentecôte, c’est justement l’inverse. Toutes les nations entendent les disciples parler dans leur propre dialecte, dans leur langue maternelle. « Tous, nous les entendons parler dans nos langues les merveilles de Dieu ». La présence de l’Esprit ouvre à une nouvelle compréhension des autres, un nouvel accueil de ceux qui sont différents, une nouvelle unité de cette humanité qui garde pourtant sa diversité.
Mais l’Esprit Saint n’est pas simplement un nouveau traducteur, une sorte de nouvelle technique pour nous entendre et nous comprendre.
C’est beaucoup plus profond que cela : c’est une nouvelle capacité de vivre ensemble, de retrouver l’unité, de partager sa foi au-delà des différences. Nous pouvons avoir des langues différentes, des cultures différentes, des costumes différents, mais tous nous partageons la même foi et la même recherche de Dieu. La Pentecôte, c’est cette effusion de l’Esprit de l’unité, et c’est aujourd’hui que nous la célébrons.
Cela a des conséquences : il nous revient de nous mettre dans cette situation d’écoute de l’Esprit, qui nous parle d’unité de l’humanité. Nous en avons une conscience plus vive ces temps-ci avec le souci nouveau que nous avons de la sauvegarde de notre Maison commune. Nous n’avons qu’une planète et c’est ensemble que nous pourrons la sauver et la transmettre à ceux qui nous suivent. Le pape François nous l’a redit avec force dans son encyclique Laudato Si. Sortons de nos luttes internes, et mettons-nous à la tâche.
Avec François d’Assise, nous avons une inspiration. Le pape nous le redit : « En lui, on voit jusqu’à quel point sont inséparables la préoccupation pour la nature, la justice envers les pauvres, l’engagement pour la société et la paix intérieure ». Que la force de l’Esprit nous donne de vivre ce projet tous ensemble dans l’unité.
Pierre de Charentenay, sj
St-Ferréol, le 23 mai 21