Homélie du 22 janvier 2023

3ème dimanche du Temps ordinaire
Dimanche de la Parole Saint Matthieu 4, 12-23

Ce dimanche est le « Dimanche de la Parole de Dieu » institué par le pape François en 2013 ; cette initiative fait suite à une assemblée des évêques sur la Parole de Dieu en 2008. L’idée est que le langage de Dieu a pris le langage des hommes.
C’est une incarnation. Il y a une incarnation de Dieu dans les langues, comme il y a une incarnation de Dieu en Jésus Christ. La Parole de Dieu que nous entendons, c’est Dieu incarné dans la Parole.

Mais alors vous me direz, ces textes de l’ancien et du nouveau testament sont des textes sacrés, immuables qu’on ne peut pas discuter et qui doivent être reçus dans leur intégralité, puisque c’est Dieu incarné. On parle bien des Saintes Ecritures. Si c’est bien vrai, cela ne veut pas dire pour autant que ces textes sont reçus de Dieu, toute écrits là-haut dans les nuages et envoyés sur terre comme une lettre par la poste qui viendrait du ciel.
La Bible a été écrite par petits bouts, avec des auteurs différents, des ajouts et des choix de paroles et de récits. C’est le travail de centaines d’années pour l’ancien testament et de dizaines d’années pour le nouveau. Ce travail a été fait sous l’action de l’Esprit Saint qui a guidé les rédacteurs et ceux qui ont fait des choix pour arriver à la version finale. C’est en cela que c’est une parole sacrée.

Il nous faut alors lire la Parole de Dieu, l’Ecriture Sainte, comme elle a été écrite, c’est-à-dire sous l’action de l’Esprit Saint. « la Sainte Écriture doit être lue et interprétée à la lumière du même Esprit que celui qui la fit rédiger » : pour ceux qui l’accueillent avec foi, elle est Parole de Dieu mise en forme par l’action de l’Esprit Saint

L’Esprit Saint a été efficace pour aboutir à un texte, il sera efficace pour nous le faire comprendre et pour nous inspirer dans son application. Il faut donc le lire avec l’Esprit de Dieu. Mais quelle est notre fréquentation de la parole de Dieu ? Est-ce que nous lisons la Bible ? Mes parents qui auraient plus de 100 ans aujourd’hui avaient dû demander une autorisation à leur curé pour lire la Bible. C’était avant le Concile. Maintenant on trouve la Bible partout et tout le monde y a accès. Avez-vous l’habitude de la lire ?
Pourquoi la lire ? Mais parce que c’est là que nous trouvons ce que Dieu dit à l’homme et nous dit. C’est par là qu’il peut nous parler si nous sommes attentifs.
Nous verrons par exemple la lumière dans le désordre de nos vies ou dans le désordre de nos communautés. La lumière se fait sur le Capharnaüm de notre évangile, c’est-à-dire la lumière sur le désordre.
La Parole de Dieu, ce sont nos yeux et nos oreilles spirituels pour avancer dans la vie. Cette parole nous dit qu’il est temps de remettre de l’ordre dans nos vies et de nous convertir. Dans la foi chrétienne, la Parole de Dieu a une autorité : suis-je disposé à ce que la Parole de Dieu ait une autorité sur moi ? Comment j’accueille cette incarnation de Dieu ?
C’est le dimanche de la Parole. Redonnons à la Parole de Dieu toute sa force, sa présence et son efficacité dans nos vies.

Pierre de Charentenay, sj
Saint-Ferréol, le 22 janvier 23

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Homélie de la nuit de Noël: Luc 2, 1-14

Quels sont les cris que nous entendons depuis des mois et des mois, sinon depuis ces derniers temps, qui expriment les différents maux – m.a.u.x. sous toutes ses formes ? D’ailleurs, certains pourraient dire, « pourquoi avoir illustré quelques-uns de ces maux ou de ces cris à travers ces photos comme toile de fond de notre crèche provençale ?
Cette période de Noël nous invite plus à émettre plutôt des cris de joie ! Des cris de joie comme celui d’un enfant qui va recevoir un beau cadeau tant espéré ou inattendu ! Comme cette dame de la rue portant un cadeau qui m’a dit dernièrement que cela faisait des années qu’elle n’avait rien reçu pour la fête de Noël. Ou alors ce papa que j’ai rencontré hier lors d’une messe de Noël que j’ai célébrée dans une maison de personnes âgées. Je l’ai vu heureux comme son fils d’ailleurs ; il ne l’avait pas revu depuis 6 ans !
C’est bien pour ces cris de joie, de reconnaissance, de solidarité et de fraternité que nous sommes aussi réunis ce soir en communauté de croyants célébrant l’Emmanuel, Dieu-avec-nous ! En même temps, ces cris de joie ne peuvent pas nous empêcher de penser à ces autres cris qui se veulent être aussi un « appel à l’amour ».

Dans les Exercices Spirituels de St Ignace, il nous est dit qu’Ignace propose au retraitant dans la contemplation du Mystère de l’Incarnation de s’arrêter sur les trois personnes divines, le Père, le Fils et l’Esprit Saint. Et ces personnes regardent la surface de la terre et voient ce qui s’y passe : le chaos sous toutes ses formes : violence, guerres, divisions, mensonge, exploitation, injustice, etc…. Et elles décident que le Fils viendra sur terre pour sauver l’humanité entière.
« Et le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous. » Jn 1, 14. C’est ce que nous avons cherché à traduire modestement à travers notre crèche de l’« Appel à l’amour » et la mise en scène pendant la veillée de Noël à laquelle nous venons de participer.
Saint Jean nous rappelle que Dieu est Amour et c’est par Amour que le Fils est venu dans notre monde pour nous sauver, nous libérer de tout ce qui nous empêche d’aimer et d’agir avec amour.
Mais Lui, Jésus, – Le Seigneur sauve -, quelle bonne nouvelle nous donne-t-il à travers sa naissance, Lui que nous contemplons dans une mangeoire à la crèche ? « Une étable est son logement. Un peu de paille est sa couchette. Pour un Dieu, quel abaissement, quel signe d’humilité ! » Chantons tous ensemble avec le p’tit-choeur, « Il est né le divin enfant »… !

Chers frères et soeurs, en ce soir de Noël, le signe que Dieu nous donne comme Bonne Nouvelle est bien celui de l’humilité et de la petitesse. Il se fait petit en venant changer le cours de l’histoire tout en apportant le salut.
Le pape Francois, dans la contemplation de la crèche, nous dit : « Dieu ne chevauche pas dans la grandeur, mais descend dans la petitesse. La petitesse est la voie qu’il a choisie pour nous rejoindre, pour toucher notre coeur, pour nous sauver… Laissons-nous traverser par cet étonnement scandaleux. Celui qui embrasse l’univers a besoin d’être tenu dans les bras. Lui, qui a fait le soleil, a besoin d’être réchauffé. La tendresse en personne a besoin d’être choyée. L’amour infini a un coeur minuscule, aux faibles battements.
La Parole éternelle est enfantine, c’est-à-dire incapable de parler. Le Pain de Vie doit être nourri. Le Créateur du monde est sans demeure. Aujourd’hui, tout est renversé : Dieu vient petit dans le monde. Sa grandeur s’offre dans la petitesse. ».
Voilà le défi de Noël pour nous aujourd’hui. Comment croire en ce Dieu qui n’épouse pas la logique mondaine où tout peut nous faire croire que les honneurs, le paraître et les grandeurs font partie des conditions pour réussir sa vie et pour réussir dans la vie ? Si nous décidons alors de suivre le Seigneur, il nous faudra nager à contre-courant comme le saumon remontant la rivière pour une bonne cause ! Pas facile et pas évident, et pourtant, tout est possible !
Le chemin que Jésus, l’Emmanuel nous dessine encore aujourd’hui, c’est de poursuivre nos actions et notre vivre-ensemble dans le quotidien ordinaire de nos vies. Le Seigneur s’identifie aux humbles et nous rejoint dans nos vulnérabilités et nos fragilités pour nous remettre debout. Et en même temps, ils nous invitent à le rejoindre pour poursuivre son oeuvre de salut et d’amour .
Ce soir, un appel à l’amour nous est lancé à travers ce coeur rempli de différentes attitudes et d’actions à mettre en oeuvre pour que le message d’espérance, apporté par Jésus, trouve toute sa signification. Des photos dans le fond de la crèche donnent déjà le ton… Le p. François Varillon nous dit, « Ce qu’il faut chercher, c’est l’amour. La conséquence de l’amour, c’est la joie ».
Si cela vous est donné, que notre réponse « Me voici » à l’appel à l’amour et que la joie qui nous habite en cette période de Noël soit aussi la joie de notre Dieu comme nous le rappelle le prophète Isaïe, « Tu seras la joie de ton Dieu. » Is 62,5. Amen.

Steves Babooram, sj
St-Ferréol, le 24 décembre 2022

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Homélie du 4 décembre

Le temps du désir de Dieu
Mat 3, 1-12 et Isaïe 11, 1-10

« Engeance de vipères ». Jean-Baptiste se fait très menaçant. Il apostrophe les sadducéens et les pharisiens avec des termes particulièrement virulents : « engeance de vipères ». Il se bat contre ceux qui ne veulent pas se convertir. Et plus loin, il dit aussi : « tout arbre qui ne produit pas de bons fruits va être coupé et jeté au feu ». On voit bien qu’il essaye d’inciter à la conversion, en faisant peur, en bousculant ses interlocuteurs.
Parfois, cette stratégie est utile. C’est une méthode qui peut marcher. En ayant peur, on commence à réfléchir. Mais pour nous aujourd’hui le stratagème apparaît quelque peu excessif. Nous n’avons pas besoin d’être encore bousculés. Nous sommes en effet déjà largement assommés par de mauvaises nouvelles de toutes sortes, et on n’a pas besoin de se faire sermonner une fois de plus : dans l’Eglise, nous apprenons chaque semaine avec effarement de nouvelles révélations qui touchent des évêques ou des prêtres. Dans le monde, nous assistons impuissant à la destruction de l’Ukraine et du peuple ukrainien. Et chez nous, nous voyons les difficultés sociales s’accumuler, avec de multiples personnes qui dorment sur les trottoirs, parfois à côté de nous, à Marseille. Les chrétiens, comme tout le monde, sont fatigués de toutes ces mauvaises nouvelles ; ils deviennent sourds au langage de la menace. Ce n’est pas ainsi qu’ils vont se tourner vers la foi et vers l’action. Ils se sentent plutôt écrasés.
Une autre pédagogie doit être employée, c’est celle de la promesse et du désir du Seigneur, tel que le livre d’Isaïe le montre. Nous avons aujourd’hui besoin d’être encouragés. Nous avons besoin de savoir que la route que nous prenons nous mène à des situations nouvelles, pleine de paix et d’espoir. Isaïe nous le dit, avançons vers le respect des plus petits. Travaillons en faveur des humbles qui nous entourent. Avançons vers la réconciliation entre ennemis, avec ces images magnifiques : « le loup habitera avec l’agneau ; le léopard se couchera près du chevreau, le veau et le lionceau seront nourris ensemble »
Pour cela, la figure de celui qui va naître dans la crèche est comme une lumière qui peut attirer notre attention : ce rejeton, fils de David, aura un esprit de sagesse et de discernement, esprit de conseil et de force : voilà tout ce dont nous avons besoin. Ce n’est pas le moment de nous laisser écraser par tous ces événements, ou d’être comme les trois singes japonais : l’un met les mains de devant la bouche pour ne pas parler, l’autre les met sur les oreilles pour ne pas entendre, le troisième les met sur les yeux pour ne pas voir. Cette attitude ne reflète pas le désir d’être présent au monde. Ce n’est pas le moment non plus de jouer les autruches qui mettent la tête dans le sable.
C’est au contraire le moment de regarder devant nous et de nous préparer à affronter ce présent que nous traversons. Nous avons besoin de cet esprit de discernement qui ne se laisse pas impressionner par les circonstances extérieures mais qui pèse le pour et le contre dans l’écoute de ce que Dieu nous indique. L’exercice du discernement nous rend acteur de notre vie et acteur dans ce monde.
Nous avons ainsi besoin de cultiver notre désir de Dieu dans cette période de l’Avent, désir de paix, désir de bien, désir de beau. En faisant grandir ce désir en nous, nous trouverons les énergies qui nous manquent pour affronter le monde d’aujourd’hui afin d’y mettre un peu de la joie et de la force de Noël.

Pierre de Charentenay, sj
St-Ferréol, le 4 décembre 22

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