Cette semaine, une animatrice en pastorale scolaire m’a raconté la préparation au baptême d’un élève de 6ème. Alors qu’elle lui présentait le temps entre Pâques et la pentecôte, il lui a posé cette question : « Vous nous dites que Jésus est mort et ressuscité, quand est-ce qu’il est re-mort ? »
La question nous fait sourire, mais elle indique très bien ce qui nous empêche de croire en la résurrection. Nous sommes des humains. C’est notre condition : nous sommes soumis à l’espace et au temps. Et du coup, nous imaginons que le Christ ressuscité habite dans un autre espace, et reste soumis à notre temporalité.
Dans le récit des Actes des apôtres, les disciples posent la question à Jésus : « Seigneur, est-ce maintenant le temps où tu vas rétablir le Royaume en Israël ? » Comme l’élève de 6ème, cette question nous fait sourire aujourd’hui. Elle indique pourtant l’horizon dans lequel les disciples essaient de comprendre la mission de Jésus.
Pour répondre, Jésus s’appuie sur l’autorité de son Père : « Ils ne vous appartient pas de connaître les temps et les moments que le Père a fixés en sa propre autorité.» Notez que Jésus répond au pluriel. Il parle des temps et des moments. Le mot grec pour ‘moment’ est ‘kairos’, ce qu’on traduit par ‘le moment favorable’, le moment où la grâce ouvre tous les possibles. Comme le dit très bien saint Paul dans la 2e épître aux Corinthiens : « C’est aujourd’hui le moment favorable, aujourd’hui le jour du salut ! »
Comment les disciples vont-ils accueillir ce salut ? En croyant à la promesse et en obéissant aux paroles de Jésus : « Vous allez recevoir une force quand le Saint-Esprit viendra sur vous ; Vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée, et jusqu’aux extrémités de la terre. »
Après ces paroles, « Jésus s’élève et une nuée vint le soustraire à leurs yeux. » Ce n’est pas la première fois que les disciples font cette expérience. Pensez au baptême de Jésus et à la transfiguration. Et pourtant, les disciples restent à fixer le ciel. Si bien que des Anges doivent leur dire : « Galiléens, pourquoi restez-vous à regarder vers le ciel ? Ce Jésus qui a été enlevé au ciel d’auprès de vous viendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller vers le ciel. »
Comment comprendre ce dernier verset ? Comme Jésus l’a expliqué au moment de la transfiguration : « son visage devint brillant comme le soleil, et ses vêtements, blancs comme la lumière.» (Mt 17, 2). Pourtant, « lorsqu’une nuée lumineuse les couvrit de son ombre », Jésus reste avec eux. Il leur demande de le suivre vers Jérusalem. Il veut qu’ils comprennent son message : par Jésus, Dieu a manifesté sa présence dans le monde. Par sa passion, Jésus a même offert la miséricorde de Dieu à ses ennemis. Par l’Esprit, Dieu vient habiter au plus intime de nous-mêmes.
Alors, « pourquoi fixer le ciel, pourquoi pleurer sa mort, je sais qu’il est vivant, il est vivant ! » C’est un chant de l’Ascension. C’est ce que nous allons célébrer en partageant le pain en son nom.
Bertrand Hériard, sj