Homélie du 26 septembre 2021

Ecartez de son coeur les occasions de chute: Mc, 9,38-48

Cet évangile apparait d’une brutalité peu commune, complètement contraire à la tradition de miséricorde qui irrigue tout l’évangile et la vie de Jésus lui-même, et qui fait partie de l’enseignement des papes récents, de Jean-Paul II au pape François. On a l’impression d’un extrémisme qu’on verrait plutôt chez les plus pharisien des pharisiens. On est dans le fondamentalisme et la raideur, qui ne sont pas soutenables.
Même si ce que nous regardons peut provoquer en nous beaucoup de jalousie et d’envie, ce n’est pas pour cela que nous allons arracher notre oeil. Même si les auteurs de pédophilie doivent être sanctionnés, il n’est pas question de leur mettre la corde au cou et de les jeter à la mer.

Alors, qu’est-ce que nous faisons de ce texte gênant ?
Il faut lire tout cela au niveau de nos motivations profondes, de nos désirs véritables, de nos pratiques et de notre regard. Qu’est-ce qui se passe dans notre coeur ?
Nous pouvons être tentés d’arranger un peu la loi pour profiter d’une occasion, un permis de construire bricolé, un passe-droit, un petit mensonge au fisc, un gros mensonge à sa famille pour garantir la considération de tous. Nous sommes jaloux du voisin, de sa maison, de son style de vie, peut-être de son intelligence et de sa réussite. Devant les appels du pape et de l’Eglise à prendre soin des migrants et des réfugiés comme aujourd’hui, nous laissons naitre en nous des réactions de méfiance, de rejet.
Tous ces sentiments qui sont en nous, dès qu’ils naissent dans notre coeur, il faut les éliminer au plus vite, ne pas les laisser prospérer, ne pas laisser la tentation s’installer.
Dans le milieu professionnel, on peut se demander quels moyens on prend pour poursuivre sa carrière. Tricher, écraser le voisin, le mettre sciemment de côté ou le détruire par des rumeurs, enfin tous les moyens que vous imaginez pour l’écarter. Voilà encore des idées à éliminer tout de suite.
Coupe ta main qui cherche à détruire un concurrent. Enlève ton oeil qui te donne un regard de jalousie. Coupe ton pied par lequel tu essaies de barrer la route à un collègue. Traduisons ces demandes en disant : enlève dès sa racine en toi ce sentiment qui pourrit ta vie spirituelle et humaine.
L’enjeu de tout cela c’est notre fidélité aux valeurs du Royaume, notre volonté de vivre ce Royaume dès ici-bas. Nous avons des choix à faire.
C’est loin d’être simple.

Cela demande deux choses : d’abord de connaître clairement le fond de nos motivations. Nous devons faire sur nous-mêmes un travail de clarification. Il n’y a rien de mieux que le brouillard pour se tromper de route. Le malin adore nous mettre dans la confusion pour que nous prenions de mauvaises décisions. Il y a donc un travail de clarté à faire dans nos intentions, dans nos motivations, dans ce que nous disons et faisons.
La deuxième chose, c’est de prendre une décision. Je peux laisser trainer sans fin une situation illégale, immorale et mortifère pour moi ou pour d’autres. Je peux me complaire dans des critiques ou dans des attitudes négatives vis-à-vis de l’Eglise. L’invitation du Christ est claire : il faut trancher dans ces velléités et tout de suite. Toute hésitation est l’oeuvre du malin.
Le Christ vient ainsi faire éclater toutes les petites constructions que nous inventons. Loin des langues de bois, il le fait de manière très nette, presque radicale. Entendons cette volonté de nous ouvrir les yeux sur nos manières d’agir et de vivre.

Pierre de Charentenay,sj

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