Homélie du jour de Noël 2020

La lumière dans les ténèbres.

Noël, c’est l’arrivée de Jésus chez nous dans ce monde, il y a 2000 ans comme aujourd’hui. Il vient sur cette terre, qui n’est ni le paradis ni l’enfer. Le paradis c’est le monde d’Adam et Eve avant le péché, le monde sans souffrance, sans maladie, sans virus, le monde de l’amour et de la liberté entre tous les êtres. Nous ne sommes pas au paradis.
Mais nous ne sommes pas en enfer non plus. L’enfer, c’est le monde où il n’y a que mensonge et violence, chacun se méfiant de tous les autres. C’est le monde où nous sommes écrasés par le mal tout le temps, sans voir jamais la lumière. Nous ne sommes pas en enfer dans le monde d’aujourd’hui même si les complotistes de toute sorte essaient de nous le faire croire.
Cette terre où vient Jésus, ce n’est ni l’enfer ni le paradis. C’est une terre ou le mal et le bien cohabitent, l’amour et la violence règnent, la santé et la maladie, la confiance et la méfiance.

2000 ans après la naissance de Jésus, ce monde qui n’est ni paradis ni enfer est bouleversé par un virus, qui a déjà fait 1 million et demie de victimes et mis des centaines de millions de gens au chômage. Les personnes en difficulté sont de plus en plus nombreuses. Des milliers d’entreprises sont fermées dans la culture, dans la restauration. La solitude et l’isolement mettent des personnes âgées en grande difficulté. Les plus jeunes, étudiants ou élèves des lycées, sont euxmêmes déstabilisés et incertains sur leur avenir. Tout cela est sombre, très sombre. Et les jours les plus sombres sont peut-être encore devant nous. Nous sommes un peu noyés là-dedans et certains y perdent espoir. Ils ne voient plus que le noir.

Charles de Foucauld écrivait à sa sœur : « tout est nuit pour nous dans l’avenir ; pour lui, pour Jésus, tout est la lumière ».

Car c’est dans cette nuit de l’inquiétude et de la peur que nous avons accueilli hier soir l’événement d’une naissance qui à l’époque n’a pas fait beaucoup de bruit ; seuls quelques bergers étaient présents pour écouter le chant des anges. Et pourtant nous croyons que cette naissance nous a apporté le bien le plus précieux, la lumière : le verbe est la vraie lumière qui éclaire tout homme dans ce monde. À tous ceux qui l’ont reçu il a donné le pouvoir de devenir enfant de Dieu.

C’est le paradoxe étonnant de ce Noël 2020, un Noël étrange où les grands parents doivent se méfier de leurs petits-enfants, un Noël étrange où il faut garder nos distances dans l’église et en dehors. Malgré notre impression d’être dans le noir, le Verbe est la vraie lumière qui éclaire tout homme. En lui est la vie, et la vie est la lumière des hommes ; la lumière brille dans les ténèbres et les ténèbres ne l’ont pas arrêtée. Les ténèbres ne peuvent pas arrêter la lumière.

Nous ne sommes pas au paradis, mais nous ne sommes pas en enfer non plus. Nous sommes sur la terre et la lumière n’est pas arrêtée par les ténèbres que nous connaissons aujourd’hui. Cette pandémie redoutable nous ramène à l’essentiel, la foi que Dieu reste avec nous, la foi qu’il y a autre chose dans la vie que travailler et consommer, la foi qui nous appelle à être présent à ceux qui sont le plus abîmés, la foi que nous pouvons dépasser ensemble cette épreuve si chacun est vigilant et prend soin des autres.

L’enfant nouveau-né est arrivé dans un monde qui était déjà bien violent à son époque, les saints innocents que nous fêterons lundi nous le rappellent. Ce n’était ni le paradis ni l’enfer. Mais c’était déjà cette terre où la lumière nous sert de guide, où la lumière rassemble, où la lumière nous trace un chemin.

Bon Noël à tous, dans la foi en la lumière.

Pierre de Charentenay, sj

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